Au début de nos expérimentations, le vélo NTM était un outil de test d’écoute de la musique dans l’espace public. Il était assumé comme un dispositif de provocation, au travers d’une écoute musicale imposée dans la rue. Nous en avons finalement fait un outil de médiation et de partage.

À quoi ça sert ? Le vélo NTM (Nos Territoires Musicaux) c’est un diffuseur mobile de son dans la ville relié au triporteur de la médiathèque. Il diffuse les ateliers et les événements de celle-ci en direct (conférences, lectures, concerts…) mettant en lumière le paysage culturel et événementiel de la ville. Un questionnement autour des droits d’auteur et de la diffusion de la musique nous a amené à prendre le parti de la création sonore. En produisant notre propre contenu, nous devenons indépendants. Cela nous a donné envie de faire participer les usagers en les invitant à créer leur propre musique mais aussi de promouvoir des scènes locales et de mettre en lumière des événements culturels.

Pourquoi ? Le vélo NTM se mêle à tous les autres cyclistes de Strasbourg et à la manière des crieurs publics, il invite à se rendre à la médiathèque pour participere ou être spectateur d’un événement.

 

Nous souhaitons connecter les enceintes du Vélo NTM à une web radio animée par la médiathèque André Malraux. L’idée ? Que tout ceux qui se munissent des vélos NTM diffusent la même musique, au même moment pour créer un concert ambulant. À travers ce dispositif créateur de lien et de partage, nous voulons également promouvoir la diffusion des musiques des scènes locales.

Nous devons à présent en imaginer la forme… À nos crayons !

Jeudi dernier, nous sommes allés à la rencontre des passants autour de la Presqu’île afin de les questionner sur l’écoute de la musique dans l’espace public. Pour cela, nous avons confectionné un outil de sondage sur lequel sont exposées 9 mises en situations. Nous souhaitions évaluer le niveau de gêne de chacun par rapport aux situations exposées. Pour nous répondre, il leur suffisait de tourner des boutons gradués de 0 à 7. 0 représentant un degré de gêne nul et 7 un degré de gêne élevé. 30 personnes se sont prêtées au jeu et se sont montrés plutôt tolérantes, voire enthousiaste, à l’écoute de la musique dans l’espace public. Cependant, la musique venant de chez le voisin ou d’un téléphone portable en haut parleur a été fortement dépréciée !

 

Découvrons la problématique. Comment permettre le partage des cultures sonores entre les institutions de la Presqu’île, pour les usagers?  Sur un site partagé entre prouesses architecturales et quiétude sonore, la richesse culturelle et musicale se fraye un chemin. De la médiathèque André Malraux, au Shadock et jusqu’au Conservatoire de Musique, l’environnement sonore n’est pas le même. Chaque institution, dans ses spécificités sculpturales, apporte ainsi une identité atypique, à mi-chemin entre paysage visuel et paysage sonore. Le Conservatoire de Musique, de son enceinte aux lignes enchevêtrées, constitué d’un assemblage de volumes et matériaux différents, traduit par exemple, par son allure, le  métissage musical qu’il suscite. Dans cette optique, nous avons cherché à associer image et son, afin d’ouvrir le dialogue autour des culture sonores.
À travers une recherche graphique, façonnée de tâches et motifs colorés, nous avons créé un atelier prospectif. Chaque tâche, chaque motif, révèle un dynamisme singulier, que les usagers pourront associer à une tendance, une préférence musicale qui leur est propre, et qui, à la fois, leur semble correspondre au visuel proposé. Identité visuelle. Collection graphique. Cartes de visite. Nous voilà fin prêts à entamer la rencontre. Celle-ci, faite successivement entre des visiteurs occasionnels ou des habitués,  plus ou moins âgés, plus ou moins pressés, tantôt très ouverts ou bien complètement fermés, nous a permis de constituer l’ébauche d’une playlist collaborative aux couleurs des motifs suggérés et des multiples personnalités.

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Après une série d’enquêtes auprès du public de la Presqu’île Malraux, deux directions de projet prennent le dessus.

La première concerne une balade sonore dans la ville de Strasbourg à travers laquelle tu pourras découvrir des sons de la médiathèque, liés aux quartiers. Des anamorphoses te permettront d’identifier le son écouté grâce à la référence. Cette balade sonore prend la forme d’évènements ponctuels animés par les bibliothécaires de la médiathèque.

La seconde intention de projet porte sur un totem de meumeumage placé au rez-de-chaussée de la médiathèque. Il s’agit de retrouver des titres de musique que tu as en tête mais dont tu as oublié le nom. La référence donnée te permettra d’aller chercher le disque au rayon multimédia de la médiathèque Malraux. De plus, tu pourras entendre les meumeumages de tes voisins au travers d’une playlist qui pourra te donner des idées d’autres musiques à écouter.

Ces deux projets s’adressent respectivement aux publics externes et internes de la médiathèque, dans un souci d’amener les collections à l’extérieur de son lieu de prédilection, et de toucher un public plus large en son sein.

 

Et si on pouvait écouter de la musique au volume sonore de notre choix dans l’espace public ?

L’idée ? Les Point(s) d’écoute, sans son, vous invite à venir plugger votre télephone ou votre MP3 sur une petite enceinte et en déterminer vous même le volume au sein de l’espace public. Comment ? Ces petites enceintes signalisées sont dissimulées sur différentes infrastructures de la ville. Soyez observateurs : réverbères et assises en tout genres pourraient en être affublés…

 

L’idée ? Tester et relever les réactions des passants face à quelqu’un qui écoute sa musique à un volume sonore audible dans l’espace public sans forcément se préoccuper des autres. Comment ? Déambuler fièrement sur notre vélo NTM équipé d’une enceinte en diffusant divers styles de musiques.

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Fabrication du prototype de l’identité graphique de Sons de cloches avec trois cartes de visite de couleurs différentes représentant la courbe sonore de la voix de chacun de ses membres. Elles sont accompagnées au dos d’un petit sifflet en papier. Une fois superposées, les cartes de visite sont glissées dans une poche dont elles dépassent servant ainsi de signe distinctif pour le groupe. Elles sont amenées à être sérigraphiée (en blanc) sur papier coloré ainsi que le nom du groupe (en noir) sur les poches.

 

 

Martial est un artiste musicien qui s’intéresse à l’objet sonore. Selon lui, celui-ci peut être caractérisé comme une entité définissable, dont l’usage, la perception, la plasticité en sont l’illustration. Ce que nous en faisons quotidiennement au niveau de son écoute, mais aussi de l’espace dans lequel nous l’écoutons, reflète notre personnalité. Imaginons un instant. Serait-il agréable d’écouter, hauts-parleurs hurlant, le dernier tube électro en vogue, lors d’une séance de relaxation? À contrario, apprécierons-nous de la même manière une musique d’ambiance, lorsqu’elle est entendue depuis un fauteuil massant ou bien d’une position de gainage? La perception, à l’échelle de l’objet sonore, est la condition, mais aussi l’attitude dans laquelle nous pouvons nous approprier le son. Grâce à l’atelier proposé par Martial, nous avons appris à “prêter l’oreille”, à se conditionner dans une posture d’écoute plus pertinente. Rassemblés dans une pièce à l’atmosphère propice à la relaxation, assis par terre, nous avons pu voyager aux travers de multiples musiques, des sentiments qu’elles dégageaient, des réactions qu’elles suscitaient. Difficile de concevoir l’idée d’écouter successivement des musiques d’inspirations cubaines puis de grands classiques de la chanson française. Encore plus difficile lorsque ces mêmes classiques, appréciés quelques minutes auparavant dans leur plus simple appareil, sont ensuite entendus dans une version remasterisée, de la balade romantique vers la pop endiablée. Et si nous étirions ces mélodies? Si nous faisions d’elles un violent vrombissement, si nous accentuons certains sons plutôt que d’autres, si nous montions le volume au maximum? Que deviendraient-elles?
Dans son ensemble, l’expérience nous a permis de comprendre le terme de culture sonore. Chaque tonalité reflète une inspiration, un univers bien à elle, potentiellement catégorisable. C’est donc ça, la culture sonore. Cependant, bien qu’une mélodie puisse s’apparenter à une culture particulière, lorsqu’elle est allongée, raccourcie, transformée dans sa tonalité, elle peut communiquer par la suite un message nouveau, par extension une culture sonore différente. Forts de notre nouveau regard sur les sons, nous avons pu étendre l’expérience vers l’extérieur, le monde réel, presque barbare, celui des bruits urbains et des cris d’enfants. Si écouter sous différents angles une musique légendaire s’avère être un exercice particulier, écouter l’environnement et son humanité l’est davantage. Grâce à Pauline – designer global qui s’intéresse aux manières d’écouter et de comprendre le son – à son travail et ses méthodes de recherches, nous avons pu saisir des techniques auditives et analytiques des plans sonores. De manière inédite, nous avons découvert et redécouvert la Presqu’île sous tous ses angles. Ses reliefs, ses textures, ses architectures, mais surtout ses sons. L’absence de son, d’ailleurs, aux premiers abords. Si nous n’y prêtions pas vraiment attention, l’endroit pourrait nous sembler terriblement silencieux. Cependant, peignant illusoirement un paysage sonore comme nous peindrions une toile, nous avons cherché à hiérarchiser les bruits alentours. La ville, tout d’abord, en arrière-plan, puis le vent un peu en avant, l’eau encore plus près, les canards, les pigeons, les ragondins, les vélos, leur cycliste, les enfants un peu plus loin. Pardi que de sons !

 

Bienvenue aux abords de la médiathèque André Malraux. La première fois, c’est aveuglés que nous l’avons traversée. Les yeux fermés, ce lieu méconnu laissait place à l’insécurité. Au delà de l’action mécanique du corps qui déambulait, conduit par un autre, un réel travail psychologique débutait dès lors. D’une certaine manière, notre esprit était endormi alors même que tous nos sens étaient en éveil. Un soupçon d’odeur marine, un brouhaha envahissant, des craquements de feuilles, le vent de front. Un monde imaginaire se substituait au monde réel que nous ne pouvions pas voir. Et pourtant, nous n’en étions pas si loin. Si dans nos têtes les lignes se profilaient, s’amplifiaient et s’emmêlaient, dessinant les ombres et lumières perçues intuitivement, au dehors elles n’en faisaient pas moins. Harmonieuse, riche de ses institutions aux architectures colossales, la Presqu’île lorsqu’elle est perçue visuellement, pourrait être dépeinte tout aussi sensiblement que par l’imaginaire de son paysage sonore. Des lattes de bois tremblantes se dessinent sur le sol, tandis qu’un cycliste passe.  Plus loin, les parterres d’herbes, jonchés de feuilles mortes, font la moue aux établissements culturels alentours, qui habillent le canal d’une démonstration architecturale de rigueur. Un envol de pigeon, un murmure de canard, et notre attention se porte désormais sur les rives bordées d’eau. Le lieu est calme, il n’hurle ni ne dérange, il murmure.
Les sons deviennent parfois des odeurs. En arrière plan, vrombissement automobile, effervescence de chantier, cris d’enfants s’ajoutent aux différents reliefs textuels. Escaliers pentus. Pont en suspension. Dallage. Bienvenue sur la Presqu’île André Malraux. Parlons-en, d’ailleurs, d’André Malraux. Écrivain, aventurier, homme politique et intellectuel, de cet homme nous pouvons dire presque autant de la médiathèque qui en porte le nom. Spectaculaire. Trépidante. Attirante. Voici ce que nous retenons de la visite de celle-ci. Elle est à la fois incroyablement grande et étonnamment construite. Fière de ses six étages de partage culturel, elle est organisée autour d’un escalier central, façon Château de Chambord, tout en métal ajouré. Quelle aventure! Chaque étage est spacieux, proposant tantôt des ouvrages à perte de vue, tantôt des espaces de rencontres, ou bien de non rencontres, des espaces de lecture ou bien d’écoute musicale, des espaces de détente ou de recherche. Elle est une sorte de parenthèse, une utopie au sein de la ville, au coeur de laquelle chacun peut laisser libre cours à ses inspirations, ses passions, ses ambitions. Lire la suite…