Présentation
Nous avons exploré la question de “faire communauté” en partant de nouvelles pratiques collectives rituelles construites autour du mythe des sorcières, de ce qui nous anime, nous rassemble et forge une identité commune.
Ici, le design interroge ce qui fait sens dans nos actions, dans les objets qui leur sont associés et dans la chorégraphie scénographiée qui leur donne vie. Ces nouveaux rituels de partage ont vocation à animer une commune rurale et son territoire, à fédérer ses habitants autour de moments partagés qui rythment les jours, les mois, les saisons, les années.
Ce temps de formation se déroule sur les 7 premières semaines de l’année scolaire 2021/2022 avec la promotion des étudiants de première année du DSAA In Situ Lab. Il fait suite à la résidence “S’bokal” menée durant un an par la promotion précédente sur le territoire de la communauté de communes de la Sauer-Pechelbronn.
Partenaire institutionnel : Commune de Goersdorf-Mitschdorf
Une proposition portée par Cécilia GURISIK, Gwenaelle PLEDRAN, Cécile MERCKEL et Jean OBRECHT
Qui sommes-nous?
Nous sommes Alix, Tom, Paula et Camille respectivement designers graphique, d’espace et d’objet, qui avons parcouru le chemin des bois de la sorcière, jusqu’à Goersdorf afin de proposer un rituel mettant le gibier à l’honneur. Voici le rituel du Nabier, mot-valise associant la nature et le gibier.
Passé – Présent – Futur
Notre questionnement s’est tourné vers la chasse, ses pratiques et ses rituels déjà existants. Cela amène à penser le rapport Homme-Animal. Nous avons souhaité faire appel à un chasseur chevronné afin de respecter les traditions déjà existantes. La chasse est difficile à aborder en 2021, c’est un sujet qui divise et les avis peuvent être tranchés. Nous avons donc fait appel à Renaud Gerst, président de l’association des chasseurs à l’arc de la fédération de chasse du Bas-Rhin, qui a accepté de venir partager son savoir et de communiquer autour des rituels de chasse déjà présents en Alsace.
Confronter nos idées à la réalité du terrain a été décisif et nous a permis d’aller plus loin, dans une vision réaliste et moins utopique de nos ambitions. La chasse est une pratique intégrant déjà beaucoup de rituels. L’un d’entre eux a retenu notre attention : le rituel de la Dernière Bouchée. Lors de ce rituel, un chasseur trempe dans le sang de l’animal un petit bout de bois que l’on nomme alors la Brisée. Une partie de ce bois est placée dans la bouche de l’animal et l’autre est remise au chasseur. Cela a pour but d’honorer le gibier et de le remercier d’avoir donné sa vie. Pour les personnes ne pratiquant pas la chasse, aucune action quotidienne ne permet de remercier la nature. Le rituel du Nabier permet de pallier ce manque.
Naissance – Vie – Mort
Les quatre designers rassemblent leurs camarades, leurs professeurs et quelques habitants de Goersdorf autour d’un atelier de fabrication de talismans dans la cour du presbytère, quelques heures avant le début de la procession du rituel. Chacun s’attelle à nouer, emboîter, accrocher des branches, feuilles et pommes de pin ramassées dans la forêt afin de créer la forme d’un gibier. Le but est de l’imaginer, de le personnifier et, ainsi, de lui insuffler une âme…
Au crépuscule, une fois les participants et leur talisman prêts, nos quatre guides prennent leurs lanternes et engagent la procession vers la forêt. Après avoir gravi la pente raide de la rue du chemin de Lembach, évité les crottins de cheval et remonté la rue du château, le groupe atteint l’entrée de la forêt. Là règne l’obscurité. Le groupe s’enfonce dans la forêt avec appréhension et curiosité, jusqu’à la découverte de trois grandes arches colorées qui ouvrent un passage vers un monde de gratitude. Elles représentent trois trinités: passé-présent-futur, naissance-vie-mort, corps-âme-esprit.
Nos quatre guides et les participants les franchissent, parcourent les branches d’arbres et les plantes grimpantes, et atteignent le lieu de recueillement. Ici, chaque membre du groupe s’apprête à laisser son talisman retourner à la terre. D’un geste unanime, les processionnaires se baissent et creusent dans la terre, de leur mains ou à l’aide d’une pelle, puis déposent leurs talismans dans le creux. Ensuite, debout et sous les indications de l’oratrice, les participants observent quelques minutes de silence, méditent, ressentent l’esprit de la forêt, la présence du gibier qu’elle a à offrir et expriment leur gratitude envers la nature. À nouveau, suivant l’indication de l’oratrice, tout le monde recouvre son talisman de terre pour clore cet acte.
À la fin du rituel, nos protagonistes prennent le chemin du retour dans l’obscurité et ressentent alors l’hostilité de la forêt. Ils repassent les arches et retournent dans leur monde ; laissant ainsi la forêt à son gibier et aux autres êtres qu’elle renferme.
Corps – Âme – Esprit
Inspiré par le respect qu’a le chasseur, ce rituel est un temps consacré au gibier que l’on voit, que l’on mange. Ce moment vient cristalliser notre connexion avec la nature ; on repense à ce qu’on lui prend, ce qu’elle nous donne et ce que nous lui devons.
Les talismans sont des artéfacts très importants dans notre rituel. Fabriqués par les initiés, ils incarnent toutes nos intentions et notre gratitude envers la nature . Ils sont fabriqués avec des matières naturelles. Les enterrer nous renvoie à l’inhumation.
Les portes ouvrent vers une nouvelle dimension dans la forêt pendant toute la période de chasse. Les initiés vont pouvoir les franchir seuls ou à plusieurs, afin d’entrer dans la démarche de gratitude. Elles représentent trois trinités en accord avec notre rituel : naissance, vie, mort ; corps, âme, esprit ; passé, présent, futur.
Se retrouver au crépuscule dans la forêt est très inhabituel, voire effrayant pour certains. Cette situation fait ressortir notre vulnérabilité. La forêt appartient désormais aux animaux.
Concept – Questionnement – Adaptation
Une fois notre concept mieux défini, nous avons expérimenté différents lieux et rythmes, afin de réfléchir au mieux l’expérience de notre rituel.
Où les arches seraient-elles le plus visibles ? Doivent-elles l’être ? Quel chemin est le plus sensoriel ? Comment nos camarades réagissent-ils ? Sont-ils sensibles ? Comment les émotions évoluent-elles ? Quand suggérer le silence aux participants ? À cela s’ajoutent des problématiques techniques. Dans quel sol pouvons nous creuser ? Quelle couleur est la plus visible dans la nature ? Faut-il représenter graphiquement la symbolique des arches ?
Être en résidence in situ nous a incité à faire des concessions. Nous avons dû faire dialoguer les contraintes du terrain avec notre idéal de projet. Confrontés à la controverse du traitement de la vie animale, nous avons organisé un rituel qui aspire à rassembler.
« Unissons nos forces, purifions nos êtres, engageons nos cœurs. »
Nous sommes Camille, Maxime, Mewen et Laurine. Mais appelez-nous les guides des Arbo’Sorciers. Installés sous nos pommiers respectifs, nous serons là pour que votre procession se passe sans encombre. |
~ UN UNIVERS SYMBOLIQUE ~
On ne se connaît pas. Personne d’ailleurs. Mais désormais, cela va changer.
Ce rituel a pour but de nous guider et de créer des liens pour mettre son passé de côté et avancer, cela en effectuant une procession retraçant le chemin de la pomme de la cueillette au jus.
Nous avons créé un portail symbolisant le passage dans un autre monde : un verger enchanté. Nous avons utilisé deux rideaux superposés obligeant à se faufiler entre eux, induisant par cette gestuelle un dévoilement progressif. Suivre le fil est important pour ne pas perdre le lien entre les étapes. Récupérer la pomme dans laquelle votre âme se reflète et symbolise votre cœur.
La gravure permet ensuite de se libérer d’un poids, de réfléchir sur vous même et votre vie. Couper la pomme en deux pour y découvrir son pentacle et laisser agir sa magie vous libérant de vos maux.
Laisser la première moitié de son cœur au plus vieux pommier montre l’importance de donner quand nous avons reçu.
Le rituel portant sur les notions de sacrifice, d’échange et de partage, la balance dans l’étape permettant d’accéder à la potion, est un écho à la pesée de l’âme dans la mythologie égyptienne. Ainsi, par l’union de leurs âmes, les initiés atteindront la potion qu’ils partageront. Elle n’est en effet accessible que si tout le monde déposant l’autre moitié de son cœur dans le réceptacle pour que le couvercle de la marmite s’élève. Nous avons établi le bras de levier pour que l’ouverture se fasse au poids de 15 demies pommes, un multiple de 5 en rapport au pentagramme caché dans la pomme
Répéter haut les coeurs, oh les pommes durant cette étape permet de sortir ce que nous avons enfoui au plus profond de nous. Déguster cette potion permet aux personnes d’en ressortir grandies et purifiées.
Le jus provient du partage des pommes arboriculteur de l’association, ce mélange de pomme crée un délicieux breuvage. C’est cette idée de partage que nous voulons transmettre. C’est donc la potion idéale pour conclure notre rituel !
Une fois la potion bue, repasser par la porte du verger enchanté permet de revenir dans une réalité plus légère.
~ PLONGEZ EN PLEIN COEUR DU VERGER ENCHANTÉ ~
Haut les cœurs, Oh les pommes, cinq étapes : une cueillette, un message gravé, une coupure éternelle, l’ultime offrande, puis une dégustation.
Le point de rendez-vous : le verger enchanté, non loin du cimetière de Goersdorf. En groupe, récupérez la caisse de rangement en bois à son entrée. Passez ensuite la porte des Arbo’Sorciers, en poussant le rideau. Suivez le fil.
Arrivés au pied du plus jeune pommier, une belle tentation vous appelle. Ouvrez la caisse de rangement. À l’aide du chiffon blanc saisissez la pomme qui vous attire. Puis, suivez le fil.
Sur sa douce peau, à l’aide de votre gouge, gravez ce que vous avez sur le cœur. Un dessin, un mot, une pensée… Suivez le fil.
Le dernier outil vous attend, un couteau à lame tranchante. Il vous permettra de découper horizontalement votre pomme.
Vous en déposerez une moitié en offrande au pied du plus vieux pommier tandis que l’autre vous accompagnera. Suivez le fil.
Dirigez-vous devant la marmite en acier. Déposez dans le réceptacle votre seconde moitié de pomme. Les nouveaux Arbo’Sorciers doivent répéter 3 fois la formule : “HAUT LES COEURS, OH LES POMMES”.
Une fois toutes les moitiés de pomme déposées, le poids sera suffisant pour ouvrir le couvercle renfermant le jus.
Munissez-vous enfin de votre coupe spéciale Arbo’Sorcier et attendez votre tour afin de récupérer votre louchée de jus de pomme.
Place à la dégustation.
~ UN UNIVERS TECHNIQUE ~
Nous avons découvert les vergers de Goersdorf, en amont de la semaine de Workshop, avec Martine, Présidente de L’association Fruits, Fleurs et Nature. Tombés sous le charme du verger, nous avons voulu à notre tour faire découvrir ce lieu et son ambiance par une procession initiatique. Cela en prenant soin de ne laisser aucune trace sur le verger à la fin du rituel.
Freddy CUNTZ, maire de Goersdorf, nous a permis de contacter le propriétaire du verger et d’obtenir son approbation pour installer notre rituel sur sa propriété. Lors de l’installation de notre rituel, nous avons pu faire la rencontre de deux habitants de Goersdorf, propriétaire des vergers aux alentours. Attirés par nos panneaux oranges, ils se sont laissé guider par leur curiosité pour nous rencontrer et nous poser des questions. Afin de guider les initiés lors du rituel, une corde en lin relie chacune des étapes et induit le sens de la progression et les étapes sont signalées par des drapeaux. Notre machine à d’échange à balancier a très bien fonctionné lors du rituel, mais le couvercle s’est relevé avant que la totalité des pommes soit mise dans le sac. Après réflexion, alourdir un peu plus le couvercle serait une bonne idée. Nous sommes satisfait dans l’ensemble du déroulement de notre rituel qui a magnifiquement clôturé cette semaine. |
Brins d’avenir
“Bocal unique, bocal magique, tu tiens en ton sein une pincée de terre, 3 brins d’espoir, un lien d’amitié et un bouquet de promesses pour l’avenir.”
-La mise en place-
Début septembre est marqué par le lancement du projet de rituels de partage et la découverte des différents groupes et sujets. Nous sommes une équipe de quatre designers de différentes sections : Yann en produit, Caroline et Émilie en graphisme et Alexandra en espace. Cette diversité se révélera être une réelle force par la suite. Notre sujet : les plantes sauvages.
Brainstormings, planche de références, univers… nous cherchons comment proposer un rituel fort et poétique. Rapidement, différentes idées se dessinent. Notre thème étant les plantes sauvages, nous pensons d’abord aux liens avec la nature, la cueillette, la matière, les sens, les propriétés médicinales et les mythes. Nous nous questionnons ensuite sur les valeurs et la symbolique des plantes.
Notre réflexion s’est nourrie de nombreuses remises en question afin d’affiner le rythme, la symbolique et l’esthétisme de notre rituel. Il se concrétise finalement autour de la volonté de créer un moment de partage et de bienveillance pour accueillir les nouveaux habitants dans le village.
-Les Préparatifs-
Une sortie dans la forêt nous a permis de prélever les différentes variétés. Une fois la cueillette réalisée, nos pas nous ramènent au Presbytère. Brins mis à sécher, couvercles peints, voici nos petits bocaux en bon chemin ! Nous prenons un temps pour discuter avec Nathalie, “sorcière” du village et fine connaisseuse des plantes. Elle nous aide à affiner notre sélection et nous éclaire sur la symbolique de chacune des espèces choisies. Ses retours nous permettent donc d’adapter nos supports imprimés. De petits cartels présentant la symbolique des plantes guident chacun pour choisir au mieux ses brins. Les invitations pour les nouveaux habitants et leurs futurs parrains-marraines, une fois finalisées, sont prêtes à être distribuées. Nous travaillons alors sur l’élaboration d’éléments permettant de récolter les brins pour les prochains rituels : panonceaux dans la forêt et cartes à distribuer, les nouveaux habitants n’auront plus qu’à se laisser guider !
-Le rituel des Brins d’avenir-
Bienvenue à vous ! Une fois que vous aurez rejoint votre parrain/marraine, dirigez-vous vers les cagettes à bocaux. Cherchez parmi eux celui qui vous inspire, qui est unique à vos yeux.
Vous tenez entre vos mains l’objet qui fonde ce rituel. Poursuivez votre cheminement en direction des paniers. Devant vous se trouvent différentes plantes séchées. Issues de la forêt de Goersdorf-Mitschdorf, elles possèdent chacune des vertus et une symbolique forte. Laissez-vous porter et choisissez trois variétés, trois souhaits pour les années à venir.
Votre guide doit maintenant écrire un mot de ses mains. Tendez-lui votre bocal, il y glissera ses vœux. L’union de ces éléments renforce la puissance des plantes.
Voici venu le temps de clore vos brins d’avenir. Fermez votre bocal. Les secrets et la magie qu’il contient vous appartiennent désormais.
Dirigez-vous, accompagné de votre parrain/marraine, vers votre foyer. Placez votre création sur le seuil de votre maison. Ressentez les émotions libérées par les plantes sauvages. Imprégnez-vous de ce sentiment d’appartenance à la communauté.
Alexandra LANDA, Caroline BENDER, Émilie DELEGLISE, Yann BONIN – 2021
✧✧✧✧✶ PRÉAMBULE ✶✧✧✧✧
Nous sommes Armand, Margaux, Léa et Laelia, quatre designers qui avons été un peu des sorcières pendant notre semaine de résidence à Goersdorf-Mitschdorf. L’essentiel de notre travail porte sur l’utilisation du feu. Nous avons imaginé un moyen de communion et d’introspection pour les habitant.e.s du village. Les goersdorfois.es sont invité.e.s à laisser derrière eux leurs renoncements au cours du Rituel des cendres. Pour cela nous avons choisi de réinterpréter le sabbat des sorcières. Il s’agit d’une fête pendant laquelle sont célébrés des rites païens. Les sorcières se réunissent de nuit dans une clairière ou dans un endroit désert, remarquable par son histoire, sa colline ou ses amas de pierres. Les sabbats ont été décrits par les détracteurs des sorcières, si bien qu’aujourd’hui nous pouvons douter de la réalité de ceux-ci. Nous nous sommes imprégné.es de l’univers populaire des sorcières et avons travaillé les artefacts tels que le chaudron et le balai qui suffisent à eux seuls à évoquer les sorcières.
✧✧✧✧✶ PRÉSENTATION DU RITUEL ✶✧✧✧✧
Nous avons imaginé un moyen de communion et d’introspection pour les habitant.e.s du village. Nous invitons les goersdorfois.es à laisser derrière eux ce à quoi iels renoncent au cours du Rituel des cendres. Celui-ci sera célébré lors de la première pleine lune de l’année. À la tombée de la nuit, les participantes* avancent en procession silencieuse jusqu’au feu qui brûle devant l’autel. Elles se placent en cercle autour et la guide dispose une traînée de sel autour du groupe pour les protéger. À présent, le rituel peut commencer. Une première personne s’avance et se place derrière l’autel situé près du feu. Elle prend un morceau de papier, écrit ce qu’elle veut laisser derrière elle au fusain. Elle prononce la phrase rituelle “je réduis en cendres ce à quoi je renonce” et s’approche ensuite des flammes. Elle prend la pique, fixe le papier dessus et le trempe dans un liquide vert puis le dépose dans le feu. Une flamme verte consume le papier. La personne reprend place dans le cercle après avoir posé la pique. Celle située à sa droite répète les mêmes gestes et ainsi de suite jusqu’à la dernière participante. L’enchaînement de ces déplacements se fait dans le sens antihoraire, en sorcellerie cela permet de retirer quelque chose, contrairement au sens horaire qui renforce. Enfin, la guide prend le balais, disperse le cercle de sel et les participantes se retirent.
*À partir de ce moment là du texte nous écrirons au féminin car nous estimons que toutes et tous nous jouons à être des sorcières. Nous tenons également, à la lumière de l’héritage historique des sorcières, à conserver le mot au féminin. Et si cela ne vous convient pas, vous pouvez toujours prendre en considération que ce jour-là nous étions plus de femmes que d’hommes à pratiquer le rituel. Et si cela ne vous convient toujours pas, vous pouvez toujours vous plaindre que, décidément, de nos jours, on ne peut plus rien dire.
✧✧✧✧✶ DÉROULEMENT DE LA SEMAINE ✶✧✧✧✧
⁎⋆⁎⋆✶ LUNDI ✶⋆⁎⋆⁎
Nous voilà arrivé.es à Goersdorf, c’est tout naturellement que nous créons un chemin pour atteindre notre future clairière de Sabbat. Nous choisissons de nous approprier une étendue de trèfles sauvages ; invisible depuis l’entrée, visible depuis l’arrière du presbytère. Nous prenons nos marques puis attendons l’aval de Freddy Cuntz, le maire du village, pour choisir l’emplacement de notre futur embrasement. Nous aplatissons les herbes en cercle et commençons à imaginer le premier dessin de notre rituel dans l’espace. Très vite, nous entamons la construction de l’autel, ainsi que la création du cratère dans lequel nous allumerons le feu. Armé.es de sécateurs, pelles et bassines nous partons en quête de terre et de végétaux. Nous trouvons du jonc, des herbes suffisamment longues et épaisses, pour confectionner la brosse de notre balai de sorcière. Nous collectons aussi de la terre d’un chantier, à l’arrière du presbytère, pour commencer notre cratère.
⁎⋆⁎⋆✶ MARDI ✶⋆⁎⋆⁎
Au milieu de la cour l’autel prend forme. Après évaluation du plus petit degré de pente du terrain, nous plaçons notre autel, il sera du côté gauche à l’arrivée des sorcières. Nous dessinons les silhouettes de plantes ramassées d’un passage de lasure sur le bois, puis arrachons les feuilles pour faire apparaître leur découpe. Désormais l’autel est marqué de son territoire. Un peu plus loin, le cratère est bien engagé. La recette est simple, il faut creuser, et récupérer suffisamment de terre dans un seau pour un demi litre d’eau et touiller. Amusée devant cette gadoue magique, Léa revit les journées d’été en vacances chez sa grand-mère. Nous étalons la boue en cercle et montons petit à petit le cratère. Il faut ajouter des branchages en lit vertical pour créer un niveau, puis rajouter de la boue, et rebelote à l’horizontal et ainsi de suite.
⁎⋆⁎⋆✶ MERCREDI ✶⋆⁎⋆⁎
Après 48h de séchage des joncs nous procédons à l’assemblage de la brosse à un charmant bout de bois biscornu qui fera office de manche. Le balai de dispersion du sel est prêt. Margaux décide de braver la pluie pour continuer à creuser et avoir assez de terre pour le cratère. Le silence, le froid et l’humidité ont malheureusement raison de son moral. Armand sentant son désarroi, prend le relais. Finalement l’ensemble avance à bonne allure et touche à sa fin. Voilà notre cratère édifié, nous enfonçons la vasque au sommet du volume pour y accueillir notre premier feu. Nous ne comptons pas le nombre d’allumettes, papiers et branchages consumés pour aider l’embrasement, finalement le feu prend, difficilement, mais il est là.
Nous consacrons l’après-midi à la finalisation des artefacts de l’autel : installation du bougeoir, sélection et découpage des papiers qui serviront à formuler les renoncements, et création du pochon de sel de protection .
⁎⋆⁎⋆✶ JEUDI ✶⋆⁎⋆⁎
Nos premières répétitions s’opèrent, se suivent, et nous aident à ajuster la chorégraphie du rituel.Conclusion des premiers tests de nos camarades : il nous faut une solution de chlorure de cuivre plus concentrée pour obtenir un meilleur effet de flamme verte, nous devons trouver des incantations pour marquer les étapes du rituel et apporter plus de mystère mais aussi guider les apprenties sorcières. Enfin, il est impératif de trouver une solution pour réduire l’épaisseur de la fumée, gênante pour les participant.e.s.
Par ailleurs, la distance de nos professeur.e.s nous fait remarquer l’incohérence de l’esthétique de l’autel, trop délicat, avec la matière brute de notre cratère. Nous expérimentons chacun.e.s différentes manières de recouvrir le bois : terre, marc de café, charbon, cirage. Le cirage fera l’unanimité.
C’est le grand soir. Laelia n’en peut plus d’attendre, elle saute sur place en répétant son texte en boucle. Le trac la gagne car elle sera la guide pendant la démonstration du rituel. Nous formons un premier groupe de volontaires d’habitant.e.s de Goersdorf et de quelques personnes de la classe. Tous.tes se prêtent au jeu et le moment devient solennel. Nos yeux s’habituent à l’obscurité et à la faible lueur des flammes nous laissant en présence des nombreuses étoiles cette nuit-là. L’assemblée nous regardant ne nous intimide plus, le rituel se déroule comme nous l’avions pensé.
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Cyril, Pauline, Hannah et Lucie vous invitent à découvrir leur rituel Ô sources inspiré du module Sorcières et Chamans.
Ô sources est un rituel de commémoration partagée pour ressouder les liens de la communauté. Il a pour vocation de réunir les habitant·es de Goersdorf au travers d’une procession le long de ses fontaines. Toutes ont une pensée dédiée aux oublié·es : Vitalité, Pardon, Paix, Amour/Amitié et Espoir. En allant de l’église au cimetière, chacun·e vient puiser de l’eau dans les sources qui résonnent avec iel pour les offrir aux tombes oubliées par une libation, en déversant l’eau chargée de toute une symbolique sur le sol. |
« Apporter sa pierre à l’édifice »
Cette phrase nous évoque beaucoup de choses et véhicule une idée forte d’entraide et de force. Une phrase qui représente bien notre équipe composée de Manon Deswartvaeger-Mollet, Mathilde Battaglia, Bilal Haddad et Amélie Bert venant chacun d’une formation de design différent (objet, graphisme et espace) et qui a guidé notre réflexion tout au long du projet. Ayant à cœur l’idée d’un design social, nous avons construit un projet autour des notions du partage, du souvenir et de la participation à la création de son environnement.
Prenez le temps de vous plonger dans notre rituel et imprégnez-vous de ses principes. Alors peut-être aurez-vous, vous aussi, envie d’apporter une part de vous dans ce vaste monde que vous partagez avec les autres :
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- J’apporte ma pierre, celle qui représente un moment qui m’a été cher durant cette année passée
- Je viens me placer autour de l’autel, rejoignant ainsi mes camarades pour ce moment de création et de partage
- En silence, je regarde une des personnes du village allumer les bougies de l’autel signalant le début du rituel
- Je prends alors un papier se situant dans le petit panier en osier noir
- Je viens inscrire un vœu pour mon voisin de droite
- “Ornementez vos pierres pour qu’elles deviennent votre talisman. Chérissez là, soyez en fier”
- Je scelle le papier, vœu face visible, à la pierre grâce au matériel mis à disposition en face de moi.
- “Par le pouvoir du feu, la pierre de ton âme s’imprègnera de ton vœu”
- Je me saisis de ma pierre et vient la placer au-dessus de la flamme pour chauffer le papier. Je la laisse jusqu’à ce que ma pierre puisse absorber totalement le souhait. Je fais tout de même attention à ne pas brûler le papier et en le plaçant à une distance raisonnable.
- Je donne ma pierre à mon voisin de droite, fier de moi et je lui transmets tout mon amour que je porte à cette pierre et le souvenir heureux qu’elle contient.
- Une fois nos partages effectués, je regarde la personne du village éteindre les bougies. Le rituel est enfin terminé, je vais pouvoir aller placer la pierre que l’on m’a offerte dans le village pour apporter une part de moi dans ce paysage où je vis en harmonie avec autrui
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“Tout au long de l’année, tu méditeras sur la pierre qui reflétera ton âme. Le jour dit, tu la prendras avec toi, cette pierre qui compte pour toi, celle qui s’imprègnera de ton souhait.
Au petit matin, autour de l’autel, le ciel comme témoin, vous vous rassemblerez pour orner vos pierres, ornementez les pour qu’elles deviennent vos talismans dont vous serez fièr.e.s. Munissez-vous de votre plume. Déposez sur un morceau de papier votre vœu que vous souhaitez à la personne située à votre droite. Scellez-le sous la pierre de votre âme. Pensez à votre souhait de tout votre cœur et apportez-la au-dessus de la bougie.
Par la magie du feu, la pierre s’imprègnera de votre vœu jusqu’à la dernière lettre. C’est avec fierté que tu offriras cette pierre à la personne à tes côtés. Pendant que vous échangerez votre pierre, vous partagerez vos souvenirs. Une fois que tu auras également récupéré la pierre qu’on t’aura offerte, tu iras la déposer au sein de ton village dans un lieu qui t’inspirera, D’un geste noble tu viendras la déposer pour embellir la communauté.
Avec le temps, le village s’embellira et s’habillera de mille et une couleurs. En vous baladant, tu te remémoreras tes souvenirs et les partageras avec les personnes autour de toi.”
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– LUNDI –
La semaine de workshop commence enfin ! Le presbytère, plein de caractère, est près à nous accueillir. Il est encore tôt lorsque nous arrivons sur les lieux. Il fait frais mais nous sommes prêts à débuter la mise en place de notre rituel. Par l’expérimentation du rituel in situ, nous avons réalisé que notre rituel ne pourra pas fonctionner tel que nous l’avions imaginé.
La réalisation d’expérimentations débute. Il faut trouver un nouveau moyen de faire disparaître l’encre, élément clé de notre rituel. Pour nous aider à mieux comparer et choisir nous avons fait de petites fiches comportant un graphique tel des scientifiques.
(ce qui s’efface : la source de chaleur solaire ainsi que la vapeur d’eau et le feu)
Notre rituel se situant également à l’extérieur de l’enceinte, nous sommes partis nous aventurer dans le village dans le but de trouver un lieu fort en sen²s pour l’emplacement de notre édifice de la communauté, le cairn.
– MARDI –
Mais où en sont tous les groupes ? Une mise au point est nécessaire pour que chacun comprenne nos objectifs, nos processus mais également nos plans futurs. Un par un, les groupes prennent la parole devant l’assemblé et affirment leurs idées. Mais nous, nous avons encore des doutes sur certains points. C’est à la suite de cela que nous entamons des discussions constructives avec nos enseignants qui nous aident à nous poser les bonnes questions pour construire un rituel plus fort en sens et adapté aux lieux et à ses habitants.
Pour nous lancer sur nos nouveaux objectifs rien de mieux que de passer au concret en réalisant des essais plastiques sur les pierres et en élaborant un story board et l’autel qui accompagnera le rituel.
– MERCREDI –
On est déjà au milieu de la semaine, le temps passe vite et il faut avancer. Deux objectifs se mettent en place : la continuation de l’intervention graphique sur les pierres ramassées et la réalisation de l’autel avec la découpe des planches et des tasseaux. Deux objectifs, deux groupes ! Séparation ! Nous sommes motivés et chacun se met à son travail. Munis de nos petites ficelles et le nez plongé dans nos pierres nous nous sommes demandé si les regards extérieurs produiraient des talismans avec un caractère particulier et nous aideraient à nous projeter sur les productions des personnes du rituel.
Nous avons également peint et bombé les paniers, les perles ainsi que la boîte pour apporter une harmonie aux artefacts.
Des incertitudes sont encore présentes sur la suite du déroulement de notre rituel, nous sommes allés à la rencontre des habitants pour leur poser des questions et être au plus proche de leur envie et besoin.
– JEUDI –
La réalisation de l’autel continue : l’objectif est de le terminer aujourd’hui ! Il faut percer, visser, poncer. Le plateau enfin achevé, il reste également la réalisation du piétement et de la cale. Mais pour qu’il ait vraiment l’allure d’un autel nous lui ajoutons des petites finitions : on fait couler de la cire d’abeilles sur les bougies et on rajoute une teinture (eau + garance). Cela apporte un côté ancien et patiné.
Le voilà enfin terminé ! Nous pouvons être fiers de nous.
Pendant ce temps là, l’atelier pierre continue
– VENDREDI –
Aujourd’hui c’est le grand jour, nous déposons des pierres dans la ville pour la préparation du rituel. Il faut également réfléchir au discours de présentation et de déroulement du rituel pour la prestation.
Après le repas du midi, nous nous rassemblons tous autour du feu pour un atelier d’écriture autour de notre rituel avant de reprendre la suite des rituels.
Une fois les présentations de tous les groupes achevées, c’est l’heure du rangement !