Rencontres

En quête de lumière sur les besoins réels des habitants, nous interrogeons l’association de quartier Horizome, située dans la maille Jacqueline. Le constat est partagé: s’il y a bien une question qui persiste, sensiblement évitée par la mairie et la Maison de Hautepierre, c’est celle du stationnement à l’échelle humaine, du piéton précisément.

Un coup de sonnette et un étage plus haut, nous voilà arriver dans l’appartement-bureaux de Horizome, collectif qui cherche à dynamiser le quartier de Hautepierre à travers des démarches transdiciplinaires pour permettre aux habitants de se réapproprier la ville. Quatres personnes nous accueillent dont, à notre étonnement, un étudiant dans notre établisssement en stage dans l’association.

Tous autour d’une table, nous questionnons l’association Horizome sur le fonctionnement du quartier, son histoire et ses habitants. Divers sujets sont évoqués, dont l’un d’eux qui retient particulièrement notre attention : la «errance» dans le quartier.

L’association explique que les hautepierriens sont à la recherche d’une identité de quartier et n’hésitent pas à participer à des ateliers, des chantiers, qui leur permettent de réinvestir l’espace public, LEUR espace public, et qu’il règne un certain respect pour ce qui a été mis en place par les habitants. En effet, aucune dégradation n’a été relevée au niveau des créations réalisées lors des ateliers au sein de l’espace public.

Les mailles de Hautepierre, exclusivement piétonne -chose appreciée des habitants-, permettent une certaine protection pour ceux vivant à l’intérieur, une sécurité bienvenue lorsque leurs enfants souhaitent jouer dehors entre voisins. Mais un problème persiste aux yeux de ses habitants : les squats des jeunes adultes, autrement dit le regroupement de personnes dans la soirée qui est alors perçu comme une nuisance pour les familles et les personnes âgées. Les aménagements urbains ont donc été modifiés, voire supprimés à l’intérieur des mailles pour éviter la présence de jeunes gens (objectif qui a aussi été appliqué pour la Plaine des jeux qui, une fois la nuit tombée, est éclairé par aucun lampadaire).
On peut donc remarquer la volonté, de la part de la ville, du bien-être des familles et personnes âgées, mais, par ce fait, la mise dans l’ombre des jeunes du quartier.
Or, comment pourrions-nous lutter contre l’isolement social, l’enclavement des habitants dans leur logement, si on leur supprime tout outil de vie, de communication?

Pourtant, cette partie des habitants fait intégralement partie du quartier, et, comme tous les habitants de Hautepierre, est elle aussi à la recherche d’un endroit où ils se sentiraient chez eux, fiers de leur lieu de vie.
Ainsi donc, comment investir l’espace public pour que chaque catégorie d’habitants puissent s’approprier son quartier, l’investir de jour comme de nuit?
Comment rendre praticable l’usage du quartier des mailles de Hautepierre, dans la limite des libertés et du respect de chacun ?

Pour aborder ces problèmes de vie de quartier avec les habitants, nous avons conçu des outils ludiques qui nous permettront ainsi d’avancer dans notre questionnement.
Nous présentons alors aux habitants deux cartes : l’une, à l’échelle de la ville de Strasbourg, nous permettant de repérer, à l’aide de gommettes, quels lieux sont les plus fréquentés par les habitants de Hautepierre ; et l’autre, à l’échelle des mailles de Hautepierre, qui va nous permettre de voir la relation qu’entretienne les habitants avec leur quartier, leur maille. En accompagnement, nous proposons aux habitants un plateau de jeu sous forme de maille-type où l’usager a la possibilité d’imaginer sa maille idéale, mais également d’imaginer un nouvel aménagement pour leur maille.

 

 

Fraîchement débarqués sur la planète In Situ Lab, trois apprentis designers entrent en communication : Elin, Reykjavikoise, spécialiste en Produit, Solène, Graphiste autochtone aux cheveux d’azur, et Jidé, l’agenais à l’accent chantant expert en Espace. Le collectif Aie Aie Aie (eye eye eye pour les anglophones) se forme; trois visions, trois champs d’action, un seul objectif : les Lumières et la ville,
Perception et usages.

 

Le secteur Nord de la ligne A du tramway strasbourgeois est notre lieu d’investigation, de la station Homme de Fer jusqu’à Parc des Sports. Nous commençons notre aventure par une première expédition en tramway afin de rejoindre le point le plus éloigné du centre. Munis d’un appareil photo, de carnets et d’un micro, nous décidons de procéder à une observation méticuleuse des usagers, du tramway et de ses environs. La ligne A file à travers la ville hyperactive et s’enfonce soudainement dans un tunnel pour desservir la gare centrale. À sa sortie, un autre monde, plus calme. Le wagon défile devant plusieurs « mailles urbaines », chacune caractérisée par une activité : zone loisir, industrielle, résidentielle, commerciale, mais aussi médicale ou religieuse. Les deux lieux de passages que forment la gare routière (arrêt Rotonde) et la gare ferroviaire (arrêt gare centrale) sont de véritables marqueurs du bond entre le centre et la périphérie.
Le tramway est un lieu à la fois de transition mais aussi de connections entre ces deux univers.

 

Quand à la lumière ?

De jour, au centre ville, la lumière naturelle est contrainte par la verticalité des bâtiments, et par des installations architecturales comme le puits de lumière à l’arrêt Gare Centrale ou homme de fer. Le paysage architectural étant de moins en moins dense à l’approche du terminus, la lumière diurne évolue et est
plus libre
.

Aie aie aie décide d’entreprendre une escapade nocturne pour devenir intime avec sa zone et en connaître toutes les facettes. Nous remarquons alors qu’au sein des lieux pavillonnaires ou résidentielles, la lumière artificielle délimite les espaces et met en valeur leur fonction : parcours cyclable/piéton, habitations, commerces ou encore panneau publicitaire. Contrairement au centre-ville où la lumière est alors omniprésente, sa fonction devient plus vague, les enseignes se confondent avec les panneaux d’informations : des lampadaires nous guident dans des parkings sombres, tandis que les ruelles touristique s’effacent dans l’obscurité. N’y aurait-il pas un équilibre lumineux
à créer ?

Mais c’est finalement de nuit que nous discernons des encarts rétro-éclairés affichant des extraits
de romans, poèmes et définitions sur du mobilier urbain de la CTS (compagnie de transport strasbourgeois).
Le savoir et la culture sont d’autres interprétations de la lumière
, c’est ainsi que nous découvrons d’autres installations culturelles. La fresque « l’empathie peut sauver le monde » à l’arrêt gare centrale, la sculpture
et le mémorial de l’Ancienne Synagogue aux Halles. Pour quoi sommes-nous passé à cotés de ces aménagements culturels ? Tout simplement de jour il n’y a aucune information concernant de tel structure/sculpture, elles ne sont indiquées nul part ni même mise en valeur. Et enfin de nuit les panneaux publicitaires Decaux projette une lumière si intensequ’ils deviennent de réels concurrents lumineux (et que nous pourrions facilement jouer à la belote). Cette pollution lumineuse ne pourrait-elle pas être remise en question ? (même si c’est cool la belote)

 

Comme nous nous y attendions, la périphérie Hautepierre est une partie de la ville dortoir. Il y a peu d’activités de jour et encore moins la nuit. Durant notre balade nocturne nous croisons quelques chats mais pas d’humains.
Il n’y a pas de lieux de vie noctambule, aucune lumière dans le parc et dans tout autres lieux qui serait susceptible d’accueillir de jeunes âmes allègres. La majorité des habitants dorment, certains s’adonnent à des activités qui paraissent louches dans l’obscurité et enfin les derniers fuient le quartier endormi pour la ville active et rayonnante.

 

« C’est cool de sortir en ville, rejoindre les potes au bar … »

 

Le tramway reste la seule anguille qui serpente vers la ville, l’activité, la lumière.

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Arrêt