Bataville, comme Natzwiller, est une ancienne ville industrielle. À Bataville, Thomas Bata a construit une ville-entreprise fabriquant des chaussures, basée sur une utopie. La vie des employés était gérée par l’entreprise. Les salaires étaient plutôt hauts pour la région, mais l’entreprise en récupérait une partie car elle possédait les logements de la ville et fournissait, via une ferme, l’épicerie du village, ce dernier vivant presque en autosuffisance. L’entreprise a aussi construit une piscine et un terrain de foot et il était bien vu d’être sportif pour décrocher une promotion dans la vie professionnelle. Aujourd’hui fermée, l’usine, qui avant organisait la vie du village, est devenue un lieu rappelant un souvenir douloureux.
Aujourd’hui l’Université foraine (initié par l’atelier Construire) a investi ce lieu sur la demande du propriétaire actuel de l’usine pour y préfigurer des projets orientés vers l’avenir.
Le Laboratoire du Dehors est intervenu dans le cadre de cette résidence. Je les ai aidé le temps de quelques jours à créer un « GR Bata ». Le constat de Théo Sacchi, membre de l’Université foraine est qu’il n’existe pas de promenade digne de ce nom pour les habitants de Bataville. Aujourd’hui la promenade du dimanche est de faire l’aller-retour vers l’usine, un chemin sur du béton dans une zone industrielle.
Le « GR Bata » aura donc vocation à proposer un autre regard sur la ville et à valoriser le territoire. Ainsi la première version de ce sentier passe par la forêt, par l’usine puis par les « terre polluées ». Cette dernière expression désigne l’endroit où l’usine rejetait ses déchets polluants. Liliana Motta et Camille Fréchou , du Laboratoire du dehors ont la volonté de travailler sur ces « terres polluées » pour les traiter grâce aux plantes et ainsi revaloriser cette partie de la ville dans laquelle personne ne va.
Le parcours fait rentrer dans l’intimité de la ville, fait (re)découvrir aux habitants de nouveaux endroits. Le chemin a cette capacité de créer un rythme qui raconte la ville : usine/forêt/ville. Il créé du lien entre ses espaces si différents et les fait exister ensemble au sein de la même partition. Le fait de se promener nous fait regarder les choses autrement, cela permet de regarder et d’apprécier le monde tel qui l’est. Dans le cadre de l’université foraine, du lieu, cela redonne des perspectives, cela permet de comprendre où l’on est …. pour lieux cerner l’endroit ou l’on voudrait aller.
La promenade peut se voir comme un outil pour échanger, parler, raconter sur ce passé très présent à Bataville. D’ailleurs, le but de ce sentier est aussi de disséminer des lieux de rencontre, pour l’instant un vaste carré a été déblayé pour pouvoir imaginer ce que pourrait donner cet espace si les travaux se prolongeaient. La volonté des paysagistes est d’en faire un endroit de rencontre et de plaisir, avec des arbres fruitiers et des tables pour goûter ou pique-niquer. Les lieux de discussions informels sont très importants dans la vie d’une ville car ils permettent aux gens de se croiser.