CARTOGRAPHIES SENSIBLES – THOMAS

Pour Quentin Lefèvre, la cartographie sensible (ou cartographie subjective) peut se définir comme un média de restitution de l’expérience du territoire ou encore comme la « spatialisation sensible de données sensibles ».

http://quentinlefevre.com/cartographie-sensible/

 

 

OBJECTIF DU PROJET :

En ce temps sans précédent dans l’histoire de l’humanité la notion d’espace n’a jamais été autant brisée, courbée, déconnectée et disloquée. Si le confinement a bouleversé la notion même de « laps d’espace », il nous offre, en même temps, une opportunité inédite d’interroger l’espace et sans doute aussi de nous interroger et de nous réinventer comme usager de l’espace. Le mot laps est généralement associé à la temporalité et caractérise un temps difficilement quantifiable ou mesurable. Il ne s’agit pas d’une référence de mesure fiable et scientifique, mais plutôt le ressenti d’une personne, qui ne repose sur rien de concret. Rapportée à l’espace le terme définit un espace ressenti et non concret.

Georges Perec retient dans « Espèces d’espaces » les laps d’espace suivants :

  • La page
  • Le lit
  • La chambre
  • L’appartement
  • L’immeuble
  • La rue
  • Le quartier
  • La ville
  • La campagne
  • Le pays
  • L’Europe
  • Le monde
  • L’espace

Nous avons donc due fabriquez 13 cartes, une carte pour chaque « laps d’espace » distingué par Georges Perec. Nous pouvons nous inspirer du texte de Perec, mais nous devons surtout travailler avec nos sens, souvenirs, impressions, impulsions, répulsions… pour produire des cartographies sensibles. Ces cartes peuvent figurer le monde tel que nous le percevons, tel que nous nous en souvenons, tel que nous le rêvons pour le jour d’après… tel que nous croyons qu’il est tel qu’il devrait être.

 

 

 

LA PAGE

Technique : Animation sur After Effects.

Plutôt que de cartographier les différentes parties qui composent une page (fonds perdus, marges, repères, paragraphes,…), j’ai décidé de représenter le déplacement de mon œil sur celle-ci. En effet l’œil humain parcours une page selon divers schémas générés par les couleurs, les formes et les images qui la composent. J’ai donc pris comme sujet le journal papier afin de comprendre comment mon œil se déplace sur les pages 24 et 25 du Journal du Dimanche du 10 mai 2020. Après lecture et compréhension des mouvements de mon regard, j’ai jugé original le fait de créer une animation représentant le trajet de ma lecture. Mon regard est symbolisé par un faisceau se laser que l’on pointerai sur le journal. Mon œil commence par lire le gros titre puis les images et se dirige vers la première colonne de texte. Suite au premier paragraphe, mon cerveau décide d’abandonner par ennui le reste du texte et se déplace vers la citation en rouge pour enfin changer de page.

 

 

LE LIT

Technique : Travail de retouche photo par un filtre/dégradé « thermique » puis élaboration d’un Gif animé.

Pour représenter le laps d’espace « lit », je me suis tout d’abord basé sur les mouvements que l’on peut faire dans son sommeil. En effet, chaque nuit, un dormeur se retourne en moyenne 40 fois dans son lit, soit 14 600 mouvements nocturnes pendant le sommeil chaque année. J’ai donc utilisé une photo d’une personne allongé dans divers posture puis j’ai décidé de retoucher cette photo à l’aide d’un dégradé faisant référence aux images thermiques de certaines cartes géographiques. Cette esthétique est souvent utilisée en géographie pour indiquer des reliefs divers. Cependant, cette représentation m’a aussi fais pensé aux images médicales montrant les zones actives du cerveau d’un individus. C’est pourquoi j’ai décidé de faire le lien entre ma carte et les rêves que l’on peut faire dans son lit. Les rêves étants des histoires que l’on ne contrôle pas, donnant parfois des scénarios et contextes complètement loufoques allant d’une simple « promenade dans les bois » à un « combat contre des monstres à dos de chameau en dansant la Macarena ». Enfin les mouvements sont représentés par l’animation en Gif des divers postures de la photo de l’homme allongé. L’homme bouge dans son sommeil. Est-il peut être en train de combattre des monstres dans ses rêves.

 

 

LA CHAMBRE

Technique : Travail graphique et typographique sur Gimp et Scribus.

À partir des souvenirs du temps passées dans ma chambre, j’ai pu illustrer le placement de la lumière du soleil sur le sol. Soleil qui parfois me réveillait le matin ou obscurcissait l’écran de mon ordinateur en fin d’après-midi. Afin de cartographier la chambre en plaçant les éléments qui la composent d’une façon originale, j’ai tout d’abord pensé utiliser des mots placés dans l’espace (feuille blanche) pour les désigner. C’est pourquoi les meubles sont indiqués par une répétition de leur nom représentant leur forme et la place qu’ils occupent. Chaque meuble est indiqué par une typographie, une taille de police ou une graisse différente afin de souligner leur importance (degré d’utilisation), leur taille (objet plus ou moins grand) ou leur matière (graisse épaisse si meuble en bois par exemple). Enfin, les quatre couleurs désignent les différents moments de la journée, par intervalle de trois heures, où le soleil se place dans la chambre.

 

 

L’APPARTEMENT

Technique : Collage d’imprimés de matières.

« L’appartement 502 » est l’appartement ou je vis actuellement à Strasbourg. Ce petit espace, composé d’une seule pièce à vivre (sur 2 niveaux reliés par un escalier de trois marches) et d’une salle de bain n’a pas grand chose à raconter malgré le temps que je peux y passer. Aucune lumière, sonorité ou bien même odeur particulière ne caractérise cet espace. C’est pourquoi je me suis dirigé vers le sens du toucher et donc des différentes textures qui composent cet appartement. Après recherches des différentes matières, j’ai tout d’abord découpé les meubles dans leur matière mais en respectant parfaitement leur forme et leur place dans l’espace. Après réflexion, j’ai abandonné ce travail qui pour moi était trop figuratif. J’ai donc gardé le respect de la place des meubles dans l’appartement mais en les symbolisant par des formes arrondies. En effet, je trouvais le rendu tout d’abord plus plastique et faisant référence à l’esthétique des « aires géographiques » que l’on peut trouver en cartographie classique. Après élaboration de la carte, j’ai enfin légendé chaque texture par la matière représentée et en les caractérisant par des adjectifs basés sur mes souvenirs, ressentis, répulsions… comme par exemple « poussiéreux », « humide » ou encore « encombré ».

 

 

L’IMMEUBLE

Technique : Conception d’un graphique avec feuille de calcul et travail vectoriel sur Inkscape.

Habitant au cinquième étage, j’ai commencé par créer un histogramme (graphique en barre) pour représenter mon immeuble. En effet, j’ai utilisé l’axe des ordonnées pour illustrer les différents étages et l’axe des abscisses pour la largeur de l’immeuble.  Après réflexion, j’ai remarqué que la barre créée par le graphique pouvait être utilisée pour symboliser la gaine de l’ascenseur (conduit contenant les câbles, la cabine,…). Utilisant l’ascenseur pour me déplacer, j’ai donc décidé de cartographier mes déplacements dans mon immeuble qui se limitent à rejoindre mon appartement, descendre les poubelles par les escaliers de secours et aller chercher le courrier. Cette représentation s’affranchie des règles de cartographie classique voulant des vues aériennes afin de permettre de montrer des déplacements en hauteur et non sur la longueur. Enfin, je souhaitais produire une illustration très filaire caractérisant mes déplacements de rapides, ne m’attardant jamais, dévalant les escaliers, ouvrant et fermant ma boîte aux lettres de façon automatique.

 

 

LA RUE

Technique : Mise en page sur Gimp des avis Google des différents commerces de ma rue.

Habitant au centre ville de Strasbourg, ma rue est très animée par les commerces qui l’a composent. On peut y trouver des restaurants, des bureaux de tabac, des agences de voyage, des fast food, des ongleries,… On peut retrouver tout ces commerces sur google avec une multitude de commentaires de la par des clients. Les commentaires sont souvent à la fois élogieux ou au contraire injurieux. Je me suis donc amusé à trouver les commentaires qui me paraissaient les plus intéressants, drôles, personnels, situationnels ou en désaccord avec mon propre avis. J’ai enfin placé ces commentaires dans l’espace pour former ma rue. Un commentaire devient donc un commerce.

 

 

LE QUARTIER

Technique : Prise de photo panoramique et retouche sur Gimp.

Quand je sors les poubelles en passant par l’escalier de secours de mon immeuble, je suis toujours surpris et en admiration face à l’empilement complexe des toits des bâtiments de mon quartier. En effet, les toits ne sont pas au même niveaux, n’ont pas la même inclinaison ou ne sont pas composés des mêmes matériaux. C’est pourquoi, j’ai décidé de travailler sur la retouche d’une photo panoramique des toits de mon quartier du point de vu que j’ai lorsque je descend les poubelles. J’ai remarqué qu’il y avait deux types de toits : les toits en tuiles et les toits en taules. J’ai les ai donc colorisé par deux couleurs différentes pour que l’on puisse différencier leur matière.

 

 

LA VILLE

Technique : Création d’une carte sur Géoportail avec une base de données d’adresses.

Site Géoportail : https://www.geoportail.gouv.fr/

Après avoir récolté les différentes adresses de mes camarades d’innovation sociale, j’ai pu élaborer une base de données contenant leur nom, leur adresse ainsi que leur type d’hébergement (maison, appartement,…). Ayant des données très concrètes, il était normal d’élaborer une carte respectant les critères géographiques et esthétiques de la cartographie classique. C’est pourquoi j’ai utilisé Géoportail, un site permettant de fabriquer des cartes à partir d’un fichier Kml. Après avoir créé ce fichier, j’ai du choisir un fond de carte ainsi que le style des données. Après avoir vu le modèle de fond de carte « Cassini » (première carte topographique et géométrique établie à l’échelle du Royaume de France dans son ensemble), j’ai tout de suite pensé à faire le parallèle entre le Strasbourg d’aujourd’hui et celui de 1760 (date de la carte Cassini). On peut donc voir que les élèves qui habitent Strasbourg aujourd’hui n’en faisaient pas partis au 18ème siècle. Enfin, j’ai choisi ce fond de carte avant tout pour son esthétique et son originalité vis à vis des autres fonds de carte que propose le site.

 

 

LA CAMPAGNE

Technique : Stylo Bic bleu

Je ne peux dissocier la campagne de mes souvenirs d’enfance passés avec mes trois cousins chez ma grand mère. C’est pourquoi j’ai voulu représenter une semaine d’été passée chez elle. J’ai tout d’abord voulu placer nos activités sur un emploi du temps mais il m’était impossible après de les placer dans l’espace. L’emploi du temps est donc devenu un fond de carte symbolisant la semaine auquel je suis venu superposer ma cartographie de la campagne. Cette carte représente donc le village de Saône-et-Loire où ma grand mère habitait avec des petits croquis montrant les activités que l’on avait l’habitude de faire avec mes cousins.

 

 

LE PAYS

Technique : Tissage sur lin et peinture.

J’ai eu la chance de parcourir une grande partie de la France avec mes parents. Chaque été, nous choisissions une destination différente. C’est pourquoi j’ai décidé de montrer chaque destination de vacance depuis 1998. Nous avions l’habitude de partir à l’océan mais il nous ai arrivé de partir à la montagne, à la campagne et même en ville. Afin de cartographier la France, j’ai utilisé du fil blanc que je suis venu tisser sur un morceau de lin. Pour montrer dans quel environnement je suis allé, j’ai peints des symboles représentant le type de paysage : une vague pour la mer et l’océan, des brins d’herbes pour la campagne, des pics pour la montagne et un immeuble pour la ville.

 

 

L’EUROPE

Technique : Collage de billets sur fond de carte Europe à l’aide de Gimp.

Source permettant l’élaboration de la carte : https://www.baudelet.net/monnaies/europe.htm

Mon oncle étant chauffeur de bus de voyage, il a parcouru l’Europe dans son entièreté. Je me souviens qu’il me montrait les vieux billets qu’il avait amassé lors de ses multiples voyages et leurs esthétiques m’avaient particulièrement marqué. Avant le passage à l’euro en 2002 pour une grande partie des pays européens, les monnaies étaient toutes différentes. C’est pourquoi j’ai voulu cartographier l’Europe en remplaçant le pays par sa monnaies des années 90. Malgré leurs différences, les monnaies avaient un point commun, celui de faire figurer le portrait d’une personnalité politique, scientifique, militaire ou artistique connue du pays. J’ai donc choisi de montrer un portrait par pays. On peut notamment reconnaître Antoine de Saint-Exupéry pour la France, Mozart pour l’Autriche, Maria Montessori pour l’Italie ou encore la reine Elizabeth pour le Royaume-Unis.

 

 

LE MONDE

Technique : Photographie Scrabble et retouche sur Gimp.

Ayant à disposition un Scrabble, je voulais absolument l’utiliser pour mes cartographies sensibles. Le tracé du plateau me faisait penser aux parallèles et aux méridien d’un globe terrestre.  J’ai donc commencé à représenter les continents sur le plateau à l’aide des pièces du jeu.  Malgré le fait que la taille du nom du continent ne soit pas représentative de sa taille géographique, je trouvais que cela fonctionnait tout de même bien . Par la suite, je me suis inspiré des cartes du monde du 18ème siècle où l’on peut voir un globe terrestre représenté en deux plans-hémisphères : l’un contenant l’Europe, l’Asie, l’Afrique et l’Océanie et l’autre contenant l’Amérique. J’ai donc pris deux photos que je suis venu retoucher à l’aide du filtre « distorsion de lentille » sur Gimp. Je n’ai eu plus qu’à coller les deux plans l’un à côté de l’autre. 

 

 

L’ESPACE

Technique : Collage de cordes blanches sur feuille noire.

Source permettant l’élaboration de la carte : https://www.lemonde.fr/blog/autourduciel/2020/02/06/le-projet-starlink-delon-musk-menace-la-recherche-astronomique/

Ma carte de l’espace fait suite à l’actualité. En effet, la société d’Elon Musk, SpaceX, prévoit de lancer des milliers de satellites pour assurer une couverture globale de notre planète, à l’exception des régions polaires. Ce projet se nomme Starlink. Son principe de fonctionnement est de saturer l’espace proche entre 340 et 1 200 km d’altitude. Cependant, ce projet menace l’observation astronomique car le ciel serait entièrement quadrillé « d’éclats artificiels en mouvement », perturbant ainsi la prise de photographies des étoiles. Suite à quoi, les astronomes professionnels du monde entier ont lancé un appel pour la protection du ciel. Ma carte est donc une représentation d’une photo prise par un télescope montrant le passage de ses satellites empêchant l’observation de l’espace.